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          Fils unique et chéri d’une riche famille, il était allé à Paris pour de vagues études à l’école des Beaux-arts, mais ce qu’il avait surtout rapporté de Paris, ce n’était pas tellement des diplômes, mais une façon élégante de s’habiller, de regarder les femmes en dilettante, comme si chacune lui paraissait unique, une manière de parler légèrement des choses graves, de se moquer avec pertinence, et de s’intéresser à tout en ne croyant qu’en lui.Il vivait en oisif des écus que produisait une petite tuilerie et que des parents sages et déjà vieux ne seraient jamais parvenus à dépenser.Il était aimé, gâté affreusement, couvé par son père qui aurait crû le tuer en l’occupant, et par une mère qui remerciait tous les jours le ciel de lui avoir donné un si bon petit.

          Blandine, elle, était pauvre. Ses parents, malgré tout, faisaient grande figure à Sainte-Marguerite car le père, fonctionnaire, avait des émoluments assez gentils pour offrir quelques toilettes élégantes, chaque année, à sa fille et à sa femme. Sa grande ambition était de marier Blandine, et de la bien marier, en donnant une petite dot et la fausse promesse d’une espérance merveilleuse. On disait de Blandine : « Elle sera riche… Un jour… A cause de la tante du Maroc qui a, là-bas, des biens… » Et le geste se perdait, accompagné du regard de tous les yeux qui fouillaient l’horizon… Là où étaient les biens.

          A la vérité, la riche tante du Maroc n’était qu’une Directrice d’école à Alger, qui donnait pour Janvier, des étrennes chics, empreintes d’exotisme à sa nièce… Cuirs arabes… Bijoux… Fourrures… Et même un billet de mille francs qui aidait à constituer depuis quinze ans les vingt-cinq mille francs de la dot actuelle.

          Blandine, vrai papillon, et tête de Linotte, s’amusait prodigieusement de cette dot à tempérament : « Je ne me marierai qu’à soixante ans, » disait-elle, « Et je serai alors un très beau parti ! » Elle ne pensait pas à l’avenir, car elle était suprêmement heureuse dans le présent… C’est elle qui donnait le ton, l’ambiance… Elle qui animait tout et, quoique moins jolie que d’autres, elle était sûre de plaire assez pour épouser celui qu’elle voudrait quand il lui prendrait fantaisie de choisir et de faire une fin comme le lui conseillait sa mère.

          Pour le moment elle était la partenaire de ce garçon curieux, un peu fat, mais riche de projets ingénieux pour faire la noce, et aussi d’argent pour les exécuter. 

                                                                           (à suivre)

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